Les médiateurs africains chargés de sortir Madagascar d'une interminable crise politique ont mis en place un gouvernement de consensus pléthorique, "bancal" de leur propre aveu, qui aura pour tâche de conduire le pays à de nouvelles élections fin 2010. Après quatre jours de négociations tumultueuses, les quatre principaux dirigeants politiques malgaches -- l'actuel homme fort Andry Rajoelina, le président déchu Marc Ravalomanana, et les anciens présidents Didier Ratsiraka et Albert Zafy -- ont paraphé samedi à Addis Abeba un "acte additionnel" aux accords de Maputo signés le 9 août. Ce texte confirme M. Rajoelina comme président de transition, mais flanqué de deux "co-présidents" issus des mouvances Ravalomanana et Zafy, la mouvance de M. Ratsiraka conservant le poste de Premier ministre, confié à Eugène Mangalaza. Ce dernier devra travailler avec trois vice-premiers ministres, pour superviser le travail des 31 ministres, répartis aussi selon les mouvances. Ce nouvel accord est censé sortir Madagascar de la crise politique née de la contestation populaire du pouvoir de M. Ravalomanana, puis de la chute de ce dernier. L'ex-président avait été contraint le 17 mars de remettre ses pouvoirs à un directoire militaire, qui les avait immédiatement transférés à Andry Rajoelina, l'ex-maire d'Antananarivo devenu son principal opposant. "A un certain moment je n'y croyais plus", a confié à l'AFP le médiateur de la Francophonie, Edem Kodjo, qualifiant l'accord obtenu au siège de l'Union Africaine (UA) de "providentiel" mais "bancal". Il assure que cette "architecture du pouvoir correspond parfaitement à la conception de la vie en société du peuple malgache: on se retrouve ensemble sur un minimum commun". Pour le Commissaire paix et sécurité de l'UA, Ramtane Lamamra, "cette acceptation a marqué le tournant dans les négociations pour dépasser le blocage". Prudent, il note que "même une monstruosité juridique peut représenter une sortie de crise". Au-delà de l'optimisme de façade, les doutes se sont donc clairement exprimés sur la capacité de fonctionner "d'une telle usine à gaz", selon les termes d'un diplomate de l'UA.
Reconnaissant que "le gouvernement fort n'arrivera qu'après les élections", M. Kodjo prévoit "des difficultés dans l'application: tout système de cohabitation est difficile, d'autant plus à quatre".